Facteurs humains (2)

 Un accident fatal est survenu.  L’équipe connaissait les pilotes. 

    Silencieuse elle serre les coudes devant le feu de cheminée que l’indispensable Lulu a allumé hors saison. 

     - Mais pourquoi on peut perdre le contrôle d’un gros avion si moderne avec toutes les pendules qui vont bien ? questionne l’ahuri. 
    - Il y en a peut-être trop, des pendules ! avise le renard. 

    Lulu console ( ? ) en confirmant que les filles peuvent pas faire 36 choses à la fois ! …  Alors des mecs ! 

     Le matheux dit que si on veut emporter plus de payants il faut enlever ailleurs au détriment de la solidité, donc on rétrécit le domaine de vol. C’est une histoire de rentabilité ! 

    Les regards assombris convergent vers le moniteur qui pour une fois restait silencieux. 

    - Hum ! Vous avez tous raison car trop d’ingénieurs aéro ne sont pas pilotes. 

Quand l’instrument est pléthorique où regarder ? Quand l’ordinateur ne sait plus faire que reste-t-il ? 

    La réponse est unanime : Le pilote ! 

     L’ahuri raconte qu’un jour il a perdu de vue son planeur modèle réduit parce qu’il était rentré dans le nuage sous lequel il spiralait. 

    - Alors qu’as-tu fait ? 

    - J’ai mis direction et profondeur à fond et au bout d’un moment qui m’a paru bien long le bazar en vrille est sorti gentiment tout droit du nuage ! 

    - Bravo ! Tu as fait ce que faisaient naguère les vélivoles quand ils perdaient les pédales en nuage… Maintenant on n’a plus le droit d’y entrer… N’empêche qu’il faut savoir en sortir ! Il faut un planeur capable… Avec un avion de ligne l’avenir est incertain ! Redites-moi ce qui est nécessaire pour voler. 

    - Une incidence correcte, la vitesse nécessaire y est liée, dit le matheux. 

    - Les ailes horizontales, dit l’ahuri. 

    - Pas d’attaque oblique qui freine et peut être dangereuse, dit le renard. 

    - Et assez de moteur pour pas descendre, achève la pratique Lulu. 

    - Bravo. Quels instruments correspondent ? questionne le moniteur. 

    - Une girouette d’incidence, dit le matheux. 

    - Un horizon gyroscopique, dit l’ahuri. 

    - Une bille ou un fil de laine ou une girouette d’attaque oblique, dit le renard. 

    - Et un altimètre, conclut Lulu. 

     - Correct ! approuve le moniteur. Mettez seulement ces nécessités suffisantes sous le nez du pilote dans un avion obéissant aux gouvernes pour remettre les pendules à l’heure avant qu’il casse… Malheureusement c’est pas toujours comme ça et on a persuadé les pilotes que la machine les remplaçait… 

     L’équipe reste triste et songeuse. 

    Le matheux promet : quand je serai ingénieur je travaillerai avec les pilotes. 

    Il ramène un peu de lumière dans les yeux de l’équipe qui se serre autour du feu. 

    Le moniteur est fier de ses oisillons qui veulent changer le monde. 

PS : On garde le badin qui sans inertie donne la vitesse et est… rassurant.